Comment rendre une visioconférence plus humaine et plus efficace
De Annika Hartmann de Meuron
11/04/2021
Il y a un an, la visioconférence devenait la nouvelle norme dans nos vies professionnelles. Elle offrait un espace sûr pour se retrouver et travailler en équipe. Cela semblait si facile. Il suffisait en effet d'inviter quelqu'un à rejoindre un appel et de continuer comme si l’on était dans la même pièce. Mais avec le temps, nombre d'entre nous ont commencé à se sentir déphasé-e-s. Des visioconférences à répétition et trop longues exigeaient beaucoup d’énergie, d’être ultra performant-e-s en toute circonstance et mettaient à mal notre sens de la connexion aux autres.
Cela s'explique notamment par le fait que notre cerveau n'est pas conçu pour se concentrer sur autant de visages à la fois. Les visioconférences sont donc beaucoup plus fatigantes que les réunions en présentiel, où nous pouvons nous concentrer sur une seule personne à la fois. Dans la vie réelle, la personne en face de nous nous envoie des signes facilement interprétables. Nous pouvons nous serrer la main pour entrer en relation et instaurer la confiance, nous avons accès à l’ensemble du langage corporel d'une personne et nous pouvons même aller jusqu’à percevoir des signaux olfactifs. Le fait d'être ensemble physiquement nous oblige à être attentifs et attentives. Seul-e-s dans nos bureaux improvisés, il est tentant de faire plusieurs choses à la fois, au détriment de notre capacité d’attention, de connexion à l’autre et de productivité.
Lors des Talks sur le Leadership éthique dans le business d'Initiatives et Changement, en février dernier, nous avons posé la question suivante : que pouvons-nous changer à une visioconférence pour être totalement à ce que nous sommes en train de faire, pour remettre l’humain au cœur de la discussion et rester productif ? Voici quelques pistes.
Pour commencer
- Avant de prévoir un appel vidéo, demandez-vous si vous si un simple email ou appel téléphonique ne seraient pas suffisants. Par exemple, avez-vous vraiment besoin de voir la personne pour lui communiquer des informations concrètes ?
- Si l'appel vidéo s’impose, assurez-vous que toutes les personnes invitées ont une bonne raison d'être présentes et savent ce qu'on attend d'elles. Les participant-e-s qui se retrouvent dans le rôle d'« auditeur passif » et « d’auditrice passive » risquent d'être frustré-e-s et de finir par faire plusieurs choses à la fois.
- Présentez les points de l'ordre du jour sous forme de questions. Par exemple : Comment pouvons-nous augmenter les réservations du Centre de conférences ? Demandez aux participant-e-s de rédiger leurs réponses dans un document en ligne partagé quelques jours avant la réunion. Cela permet de préparer la réunion et de gagner du temps pendant la visioconférence, car la discussion peut être articulée autour des réponses fournies en amont.
- Évitez les PowerPoints, car ils ont tendance à mettre à mal la connexion entre les participant-e-s et sont de plus rarement compréhensibles. Invitez plutôt les participant-e-s à envoyer leurs documents écrits à l'avance et demandez-leur de les commenter et de donner leur avis une fois en ligne.
Le timing est essentiel
Vous êtes chargé-e de la modération d’une visioconférence ? Faire respecter le temps accordé à chacun des points de l’ordre du jour est un exercice difficile. Il est pourtant crucial de respecter le temps imparti, car la plupart des participant-e-s auront plusieurs visioconférences au cours de la journée et besoin de pauses entre chacune d’elles. Quand on est en télétravail, les déplacements ne prennent que quelques secondes et l’on passe trop de temps assis. En tant qu'organisateur ou organisatrice de réunion, il vous revient de prévoir dans l'ordre du jour une pause d'au moins 5 minutes toutes les 50 minutes pour permettre aux participant-e-s de faire quelques exercices d’étirement. Vous trouverez ici quelques exemples.
Des chiffres réalistes
Il est non seulement important de bien réfléchir à qui doit participer à une réunion en ligne, mais aussi au nombre de participant-e-s maximum pour qu’une réunion reste productive. En effet, si, comme l’explique Jeff Bezos avec sa « règle des deux pizzas », l’on ne peut pas nourrir une équipe avec deux pizzas, c'est qu'il y a trop de participant-e-s. Cependant, si vous vous réunissez toujours avec les mêmes personnes, vous risquez de ne plus être capable d’aller au-delà des sentiers battus et de ne pas être conscient-e des besoins d’autres groupes de personnes. L’utilisation de salles de discussion (« breakout room ») peut s’avérer une excellente solution pour rester efficace et productif malgré un grand nombre de participant-e-s. En effet, une discussion en plus petit groupe, offre à chaque participant-e-s la possibilité d’exprimer son opinion. Ces idées pourront ensuite être partagées dans la réunion principale après une séance de débriefing. Nombreuses et nombreux sont les participant-e-s à apprécier ce temps en petit groupe. Ils permettent en effet de nouer des liens et d'accomplir des choses ensemble, ce qui nous manque lorsque nous sommes seul-e-s dans nos bureaux, chacun-e chez soi.
Posez des règles de base
Si vous vous réunissez régulièrement avec le même groupe de personnes, il est essentiel de convenir de règles de base afin de créer un espace sûr. Voici quelques questions que vous devez vous poser : Voulez-vous que les caméras soient allumées ou éteintes, et les micros activés ou non ? Est-il acceptable d'arriver en retard ou de quitter la réunion plus tôt ? Voulez-vous inviter les participant-e-s à faire des commentaires et à poser des questions ? Allez-vous autoriser les PowerPoints ? Comment pouvez-vous empêcher un participant-e de monopoliser la conversation ? Ces règles de base doivent être établies par tou-te-s les participant-e-s aux réunions régulières et revues de temps en temps pour s'assurer qu'elles sont toujours pertinentes.
Le rôle des modérateurs et modératrcies
Véritable gardien-ne du temps, le modérateur ou la modératrice doit également veiller à ce que chacun-e participe et se sente connecté-e. Préparez-vous en prévoyant du temps entre les réunions, pour faire des étirements, vous octroyer un moment de calme, vous connecter à vos émotions, et vous demander quelle image vous souhaitez donner de vous et ce que vous désirez apporter à celles et ceux qui rejoignent la réunion. Plusieurs études ont par exemple démontré que le rire permettait aux personnes d’établir une relation, regardez peut-être quelque chose qui vous fera sourire avant de commencer la réunion. Il peut également être utile de cacher votre vidéo, car voir son image à l’écran peut être source de distraction et vous faire agir de manière peu naturelle.
Quelques conseils pour une modération réussie:
- Lorsque les participant-e-s rejoignent la réunion, accueillez les personnellement et prévoyez 5 minutes de conversation informelle. Pour encourager la participation active pendant la réunion, il est important de laisser chacun-e s'exprimer brièvement au début. Vous pouvez essayer quelques trucs et astuce pour briser la glace et lancer une discussion animée.
- Lors de réunions plus longues, vous pouvez accroître l'attention et la participation en attribuant des rôles aux participant-e-s, par exemple en les chargeant de la modération dans les salles de discussion, du chronométrage ou du suivi de l'humeur. Vous pouvez également demander aux personnes de donner leur avis, mais laissez-leur toujours la possibilité de s'abstenir, car il ne s'agit pas de mettre quelqu'un sur la sellette. Pour éviter la pensée de groupe, posez régulièrement des questions : Qui a une autre réponse ? Cela crée un peu de suspens et capte l'attention de chacun-e.
- S'il y a des décisions ou des questions importantes à aborder, accordez un temps de réflexion silencieuse ainsi qu’un tour de table pour partager les idées. Dans un espace virtuel, il est beaucoup plus difficile de ressentir l'ambiance d’une réunion. Ainsi, le fait d'offrir à chacun-e un temps de réflexion peut permettre à des idées non exprimées de faire surface. Vous pouvez également utiliser des outils comme Mentimeter pour évaluer l'atmosphère d’une réunion. Commencez et terminez toujours la réunion en vue Galerie, afin que chacun-e puisse voir une dernière fois l’ensemble du groupe et se sente intégré-e.
Enfin, prenez le temps avec vos collègues, de temps en temps, de faire le point sur leur expérience du travail à distance et de la visioconférence. Cela vous aidera à définir ensemble quelle formule vous correspond le mieux pour favoriser une présence attentive, une relation humaine et atteindre les objectifs fixés.
Annika Hartmann de Meuron est la responsable du programme Leadership éthique dans le business et elle développe toute l’année des activités associées aux pratiques éthiques dans le business, qui offrent aux entreprises l’opportunité d’établir des relations avec leurs homologues, de découvrir les lignes directrices associées et de faire l’expérience de l’approche éthique spécifique de I&C Suisse. Elle a travaillé pendant de nombreuses années en tant que consultante en responsabilité sociale des entreprises pour la Fondation Philias, et dans la communication pour le Forum humanitaire mondial et l’agence de relations publiques Rochat & Partners.
En savoir plus sur Leadership éthique dans le business
- Photo en haut et teaser: Chris Montgomery sur Unsplash
- Cet article a été initialement publié sur LinkedIn.
Etre bien dans ma peau
CPLP Talks 4
11/03/2021
Tinotenda Dean Nyota est originaire de Gweru, au Zimbabwe et participe en 2018 au Programme de Caux pour la paix et le leadership. Il est diplômé en économie et se décrit comme un citoyen actif, passionné par l'entrepreneuriat et le développement.
« J'ai grandi dans le Zimbabwe post-colonial, dans une société où tout ce qui était étranger et blanc était considéré comme supérieur à ce qui était local et noir.
Les meilleures écoles de mon pays, que tout enfant rêve de fréquenter, sont les écoles privées, perçues comme des « écoles blanches ». Les meilleurs quartiers, les plus sûrs, où nous souhaitons vivre, sont dominés par une structure culturelle différente, que nous percevons une fois de plus comme étant blanche. Le fait de parler couramment l'anglais est synonyme de richesse et d'intelligence. Nous voulons tous nous habiller comme les personnes blanches, manger et vivre comme elles. Et tout cela alors que le pays est indépendant depuis plus de 40 ans !
La première fois que je me suis tourné vers la découverte de soi, c'était lors de ma participation au CPLP, en 2018. C’était l’époque de la Coupe du monde de football, et je soutenais l’équipe de France car Paul Pogba jouait habituellement pour Manchester United, mon équipe préférée. Je peux vous en dire plus sur Manchester que sur ma ville natale. Je suis plus calé sur la première league anglaise de foot que sur celle du Zimbabwe. Ma langue de prédilection, mon code vestimentaire et mes habitudes alimentaires étaient tous inspirés par des figures de personnes et d'institutions blanches.
C’est désormais une autre image que je vois de moi dans le miroir, Je me sens de plus en plus à l'aise dans ma peau
Durant le CPLP à Caux, chacu-e d’entre nous a été amené-e à partager sa propre histoire. Les participant-e-s venaient de plus de 40 pays et cultures différents, étaient tous très fières et fiers de ce qu'ils et elles étaient. Leurs récits révélaient l’estime que toutes et tous avaient pour leur langue, leur nourriture ou encore leur style vestimentaire. J’ai alors realisé une chose qui m’a fait me sentir mal à l’aise : je me sentais plus britannique que zimbabwéen.
Lorsque je suis retourné chez moi après ce séjour à Caux, je me suis senti poussé à animer une discussion dont le sujet était : « Etre jeune et noir au Zimbabwe ». Cela m'a fait réaliser que je n'étais pas le seul à vivre la réalité isolante d'une crise identitaire. Ces dernières années, j'ai pu constater un changement dans l'attitude des jeunes, pour qui être noir et originaire du Zimbabwe est positif. C’est désormais une autre image que je vois de moi dans le miroir, Je me sens de plus en plus à l'aise dans ma peau et j’aime mes cheveux noirs et bouclés. Ils sont beaux, tout simplement. Le mouvement « Black Lives Matter » ne pouvait pas arriver à un meilleur moment, alors que nous, jeunes du Zimbabwe, cherchons à retrouver notre identité dans un Zimbabwe indépendant. »
Découvrez plus d'article des CPLP Talks sur le thème de la culture et son impact sur notre vie:
- Charlotte Rémie: Le meilleur de deux cultures
- Sebastian Hasse: Culture, origines et liberté
- Abeda Nasrat: «.Afghanistan m'a donné des racines et le Danemark des ailes»
Les conversations en ligne du Programme de Caux pour la paix et le leadership, les « CPLP Talks », offrent un espace en ligne privilégié où l'on partage des histoires et où se créent des liens. Cette série de conversations en anglais a vu le jour grâce aux alumni du Programme de Caux pour la paix et le leadership (CPLP). Ces discussions, loin d’être à sens unique, sont l'occasion d'écouter de jeunes leaders du monde entier, de s'inspirer et de s'engager.
Les CPLP Talks auront lieu sur Zoom. Si vous souhaitez participer à la conversation de suivi en ligne qui aura lieu le samedi 13 mars 2021 à 14h00 CET (13:00 GMT) avec les alumni du Programme de Caux pour la paix et le leadership, vous pouvez vous inscrire ici:
Nous avons besoin de vous !
En ligne ou en personne?
08/03/2021
Depuis 75 ans, Caux est le lieu où nous rassemblons des gens du monde entier pour qu’ils puissent réfléchir, partager leurs histoires et trouver l’inspiration pour prendre des initiatives pour un monde juste, en paix et durable.
La pandémie COVID-19 nous a donné l’opportunité de mettre notre offre en ligne et ainsi de pouvoir accueillir beaucoup plus de participant-e-s. Maintenant que nous l'avons fait, nous voulons réfléchir à l’impact de ce changement. En partenariat avec le Département fédéral des affaires étrangères suisse, nous tentons de mieux comprendre les différences entre les événements en personne et en ligne, en nous concentrant particulièrement sur le contexte de la consolidation de la paix.
Pour ce faire, nous avons besoin des opinions des membres de notre communauté qui ont participé à nos événements en ligne et en personne à Caux. Si vous êtes l'un-e d'entre eux/elles, aidez-nous en répondant à cette enquête avant le 16 mars 2021. L'enquête prendra seulement 15 minutes de votre temps. Pour répondre en français, vous pouvez choisir la langue de votre choix en cliquant en haut à droite.
Vos réponses nous aideront à exploiter les points forts de chaque modalité pour la création de nos futures événements et programmes.
Pour faciliter l'analyse des résultats, cette enquête est disponible uniquement en anglais et en français, les deux langues dans lesquelles se sont déroulés les événements du Caux Forum Online 2020. Toutefois, il est possible de répondre aux questions ouvertes en allemand si nécessaire. Les résultats de cette enquête seront communiqués publiquement, y compris sur notre site web.
Merci pour votre aide !