Refaire le monde : Des expériences de l'Eswatini et de la Colombie
Caux Peace and Leadership Talks 8
11/11/2021
La huitième édition des CPLP Talks fait la part belle au courage dont font preuve les ancien-ne-s du Programme de Caux pour la paix et le leadership (CPLP) afin de relever les défis auxquels le monde est confronté. Voici quelques-unes des initiatives prises par des ancien-ne-s participant-e-s originaires d'Eswatini et de Colombie.
Se tenir debout et faire entendre sa voix
Temantungwa Ndlangamandla, est originaire du Royaume d'Eswatini. En 2017, elle participe au CPLP. Elle vit actuellement à Taïwan et nous livre son témoignage :
Le 29 juin, je me suis réveillée en apprenant que mon pays brûlait. Le Royaume d'Eswatini, un pays pourtant connu pour sa stabilité et l'absence de conflit ouvert, était tout à coup sur le point de sombrer dans le chaos.
Pour la première fois de notre histoire, nous avons assisté à des meurtres et des mutilations brutales de civil-e-s non armé-e-s. Les fusillades ont eu lieu durant toute la journée et toute la nuit. Au petit matin, le pays tout entier était maculé de rouge. Eswatini saignait. La terreur et les traumatismes envahissaient les maisons.
Je me suis demandé : « Quelle est la prochaine étape pour le royaume d'Eswatini ? Oublions-nous les personnes tuées et blessées ? Espérons-nous simplement que si nous ne faisons rien et prions, l'histoire ne retiendra jamais cette tragédie ? ». Puis je me suis demandé : « Que dois-je faire ensuite ? Est-ce que je suis témoin de cette situation et je prie pour qu'elle disparaisse ? Ou est-ce que je me lève et m'exprime pour essayer d'amplifier la voix des personnes touchées ? »
Les temps de réflexion personnelle que j’ai appris à prendre grâce au CPLP, m'ont aidée à voir clairement où était ma mission et où je pouvais être le plus utile.
Que dois-je faire ensuite ? Est-ce que je suis témoin de cette situation et je prie pour qu'elle disparaisse ? Ou est-ce que je me lève et m'exprime?
Aussi difficile et long que soit le voyage, la justice transformatrice est une aspiration qui mérite d'être poursuivie. Un groupe d'hommes et de femmes originaires d’Emaswati s'est donc créé à Taïwan et une équipe, que j’ai l’honneur de présider, s’est mise en place. Notre mission est de soutenir et d'amplifier les voix des Swazis dans leur marche vers la qualité de vie et le changement durable.
Nous avons fait des dons à des organisations sur le terrain et nous nous sommes associé-e-s à des travailleurs sociaux et à des travailleuses sociales pour venir en aide aux enfants blessés par des balles perdues. Nous nous sommes associé-e-s à des écrivain-e-s et poètes swazi-e-s pour partager leurs expériences vécues en Eswatini. Nous nous sommes également associé-e-s à des artistes pour que l'art devienne une forme de plaidoyer. Cela nous a permis de mieux comprendre les complexités du travail sur le terrain. Nous avons également commencé à nous associer à des organisations à Taïwan afin de sensibiliser le public à la situation de l’Eswatini.
Comment donc pouvons-nous contribuer à refaire le monde ? Commençons par prendre le temps de réfléchir et de dénoncer les injustices qui se produisent autour de nous. Nous devons nous tenir aux côtés des populations d'Afghanistan, du Zimbabwe, du Congo et de tous ces autres pays où les droits humains sont bafoués. Caux m'a inspirée. J’ose mobiliser mes forces un monde dans lequel la paix est possible, où chacun peut vivre en sécurité.
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Rompre l'isolement
Les ancien-ne-s participant-e-s du Programme de Caux pour la paix et le leadership (CPLP) en Colombie décrivent dans ces termes la réponse qu’ils et elles ont apportée aux troubles qui ont éclaté dans leur pays en avril dernier en réaction aux divisions économiques et politiques, et aggravées par la pandémie :
La Colombie est l'un des pays les plus inégalitaires au monde. Nous avons vécu plus de 50 ans de conflit armé.
En avril dernier, des manifestations ont éclaté dénonçant les réformes fiscales, avec pour protagonistes les jeunes des classes inférieures. En réponse, l'État a fait un usage excessif de la force et les violations des droits humains se sont multipliées.
Les ancien-ne-s participant-e-s au CPLP en Colombie se sont réuni-e-s pour créer un espace de dialogue, le Youth Beyond Borders Forum, où nous avons pu entendre le message des jeunes des écoles publiques de Bogota. Nous voulions créer un espace sûr, afin que ces jeunes ne se sentent pas isolé-e-s.
Le Forum a eu lieu en mai. Il a offert aux jeunes l'occasion de rencontrer deux ancien-ne-s du CPLP, Antoine Chelala (Liban) et Lorena Mier y Terán (Mexique), qui ont tous deux présenté des actions initiées pour insuffler des changements dans leurs pays respectifs. Ismar Villavicencio, qui fait partie de l'équipe de soutien aux échanges internationaux d'I&C en Amérique latine, nous a rejoints depuis l'Uruguay.
Le Forum nous a permis de nous connecter de manière nouvelle aux émotions générées par la situation en Colombie et a également mis les jeunes en contact avec la communauté de soutien qu’est Caux.
Les jeunes Colombien-ne-s recevront bientôt des lettres pleines d’empathie et de soutien, action orchestrée par We Love From, une initiative menée par des ancien-ne-s du CPLP/Creative Leadership du Mexique.
Our intention was to create a safe meeting place so that young people would not feel isolated.